L'Evangile de Luc

On trouvera ici une version plus développée que celle qui a été présentée dans le livret. Merci à Sœur Odile Ribadeau Dumas et au Père Philippe Bacq

Présentation de l'Evangile de Luc

 

 

 

Ecrit en grec vers les années 80, le troisième évangile précède les Actes des Apôtres. Comme les autres évangiles, il n’est pas une biographie détaillée de Jésus de Nazareth,  il est le témoignage d’une communauté chrétienne qui croit en Jésus-Christ vivant parmi elle, qui le célèbre et désire vivre de son Esprit, à  sa manière. Un de ces chrétiens, que la tradition appelle Luc, recueille ce témoignage et l’adresse à un autre croyant Théophile. L’auteur désire lui montrer la solidité des enseignements qu’il a reçus et pour cela, il organise en un récit très composé les éléments de la tradition sur Jésus dont il dispose. (Cf Lc 1,1-4).  

 

L’itinéraire qu’il propose comporte quatre étapes.

 

1          L’évangile de l’enfance (1-2) Ces deux chapitres présentent un genre littéraire très particulier ; s’appuyant sur l’Ancien Testament, le narrateur montre d’abord comment Dieu a préparé la venue de Jésus ; puis il raconte des événements autour de sa naissance et de son enfance. Dans un style imagé qui touche parfois au merveilleux, il recueille comme en un timbre-poste tout le mystère de la personne de Jésus : il est le Messie attendu, le Sauveur, le Fils du Très-Haut.

 

2          La vie publique en Galilée (3,1-9,50). Ces chapitres sont centrés sur l’identité de Jésus et l’autorité de sa parole. Après avoir été baptisé par Jean-Baptiste dans le Jourdain, et avoir traversé au désert l’épreuve du soupçon inspirée par Satan (3,1-4,13), Jésus vient à Nazareth, où il avait été élevé. Un jour de sabbat, dans la synagogue, il se présente et définit sa mission : il est celui que Dieu a consacré pour annoncer la Bonne Nouvelle aux pauvres, comme l’avait déclaré jadis le prophète Isaïe. Ce jour-là, les siens ne le reçoivent pas, cherchent à le tuer, mais il passe son chemin (4,13-30). Toute la suite du récit est déjà condensée en cet épisode. 

 

            Sur les routes de Galilée, il chasse des démons, guérit des malades, tels un paralytique et le serviteur du centurion ; il appelle des disciples à le suivre, débat avec les pharisiens et prononce un enseignement dans la plaine qui dessine les grandes attitudes du Royaume. La foule finit par reconnaître en lui un grand prophète (7,16), tandis que les autorités religieuses le rejettent (4,31-7,17).

 

            N’est-il qu’un prophète ? Une première question de Jean-Baptiste  « Es-tu celui qui vient ou devons-nous en attendre un autre ? » est relayée plus loin par une autre lors d’un repas chez un pharisien Qui est cet homme qui va jusqu’à remettre les péchés ? Entre les deux, des signes à profusion donnés à Jean et l’accueil d’une pécheresse chez Simon le pharisien continuent d’étonner : Qui est cet homme ? (7,18-50).

 

Entouré des Douze et de quelques femmes qui le suivent, Jésus ne cesse d’annoncer la parole : il est le semeur et la lampe qui éclaire, il fonde une famille sans frontière. Quatre œuvres de puissance illustrent l’autorité de sa parole : durant la traversée vers l’autre rive, il délivre ses disciples d’une tempête ; en territoire païen, il libère un démoniaque des forces de mort qui l’oppriment. Au retour, il guérit une femme atteinte d’un flux de sang et rend à la vie la fille de Jaïre. Rien n’arrête la vie qu’il fait jaillir de toute part : la mort elle-même recule devant la bonne nouvelle du Règne de Dieu (8,1-56).

 

Au terme, il pose à ses disciples la question décisive : « Et vous, qui dites-vous que je suis ? » Pierre se risque alors : Tu es  le Christ de Dieu  (9,18-22). Jésus lui répond de façon surprenante : il sera rejeté par les siens, passera par la souffrance et la mort avant de se lever d’entre les morts. Il forme ses disciples à suivre son chemin : il les envoie en mission sans aucune garantie, leur apprend  à partager le pain et à vivre dans la foi (9,1-50).

 

3          Le long voyage vers Jérusalem (9,51-19,48). L’événement de la transfiguration décide Jésus à faire route vers Jérusalem où il pressent qu’il va mourir. Durant ce long chemin, propre à l’évangile de Luc, le narrateur précise la manière dont Jésus est Christ et les conditions à remplir pour devenir son disciple et entrer dans le Royaume. Avec beaucoup de finesse, il croise ce qui concerne Jésus lui-même et ce que celui-ci demande à ses disciples.

 

            D’une part, Jésus accepte librement la violence qui le conduit à la mort sans y répondre par la violence. Il donne sa vie. Il sera Christ, non pas à la manière des rois de jadis, dans la force et la contrainte, mais dans la douceur et la simplicité ; il apporte la paix et enseigne les chemins de la paix.  

 

D’autre part, il continue d’instruire ses disciples sur les exigences à accepter pour le suivre et entrer par la porte étroite du  Royaume : écouter la parole et  la mettre en pratique, rester petits et confiants en Dieu, devenir serviteur, préférer l’amour et la justice à l’observance des prescriptions rituelles de la Loi, se rendre libre par rapport à l’argent, se soucier des pauvres, se pardonner entre frères… En grand contraste, il dénonce aussi ce qui fait obstacle : la suspicion, le mensonge, la cupidité. Il ne craint pas d’évoquer l’épreuve à traverser : la persécution.

 

Mais, il communique sa certitude : le Royaume germe et grandit à travers les violences de l’histoire. Il arrivera à maturité, tel un grain de sénevé jeté dans un jardin. Ce sera un jour de joie, figuré sous l’image d’un banquet, auquel prendra part une multitude de païens qui auront agi selon leur conscience ou se seront convertis à la parole. Cependant, ce sera aussi un jour de jugement pour tous ceux et celles qui auront vécu dans le mensonge, l’injustice et la violence. Sur tous les tons, en discours et en paraboles, le narrateur annonce l’urgence de se convertir pour entrer dans la fête. Mais, au centre de cette partie, il montre aussi l’infinie tendresse de Dieu dans les trois paraboles de la miséricorde.

 

Quelques grandes figures de croyants se détachent : Marie dans la maison de sa sœur,  le lépreux samaritain, l’aveugle de Jéricho, Zachée. Chacun à leur manière, ils sont déjà des hommes et des femmes du Royaume.

 

Durant cette montée vers Jérusalem, la parole se fait plus dense, plus incisive. Le lecteur est sans cesse interpellé. Le Christ va vers sa mort, affrontant toutes les oppositions ; le chrétien  ne peut le suivre sur ce chemin qu’en répondant de façon radicale à l’appel qui lui est adressé.

 

4          A Jérusalem (20,1-24,53) : dans le Temple, Jésus annonce la Bonne Nouvelle au peuple tandis que les autorités religieuses le contestent et décident de le tuer. Il répond en s’appuyant sur les Ecritures : il est le fils bien aimé ; ils le rejetteront, mais Dieu l’élèvera et il deviendra la pierre d’angle du nouveau peuple de Dieu. Il prononce ensuite un long discours sur la ruine de Jérusalem et la fin des temps, quand le Fils de l’homme viendra dans la gloire. En l’attendant, il convient de rester vigilant.

 

Suit le récit de la passion, depuis la préparation du dernier repas de Jésus avec ses disciples jusqu’à son ensevelissement. Dans tout cet ensemble, le narrateur montre comment Jésus réalise en sa personne de nombreux passages de l’Ancien Testament qui annonçaient un serviteur humilié, rejeté, et demeurant fidèle à Dieu. Même Pilate devra en convenir lors du procès. Mais le narrateur va encore plus loin : la manière dont, sur la croix, Jésus pardonne à ses ennemis, révèle le cœur du Père qu’il n’a cessé d’annoncer. 

 

Enfin, les événements du jour de Pâques  clôturent le récit: l’annonce à quelques femmes de son éveil de la mort ; sa manifestation à deux disciples sur le chemin d’Emmaüs, puis aux Onze et à leurs compagnons à Jérusalem. Il leur apprend à relire tout ce qui le concernait à la lumière des Ecritures et leur promet de leur envoyer la puissance d’en haut, avant d’être enlevé au ciel sous leurs yeux. En terminant son récit par l’Ascension, le narrateur le relie étroitement aux Actes des apôtres qui commenceront à Jérusalem de la même manière.

 

D’un bout à l’autre, la dynamique de cet évangile est un itinéraire catéchétique ; il conduit à mieux connaître la personne de Jésus-Christ, à choisir de vivre selon le Royaume et pour certains, à devenir disciples à sa suite. Bonne lecture !

 

 

 

Référence bibliographique :                             

 

Ph. Bacq, O. Ribadeau Dumas, Puissance de la Parole, Luc un évangile en pastorale, Luc 4,14-24,53, Tome 2, Bruxelles, Lumen Vitae 2012.

 

 

Article publié par Curé de la paroisse St Jean-Baptiste de l'Escaut • Publié le Vendredi 30 novembre 2012 • 3435 visites

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